Evidemment, à la relecture de ce que je viens d'écrire, j'y trouve mille objections. La première c'est qu'on pourrait me dire "à vouloir enraciner tes problèmes -psychologiques, diront nous, mais ils sont aussi philosophiques- dans la philosophie uniquement, tu vas te perdre et t'inventer des soucis que tu n'avais pas, tu vas reformuler des problèmes conceptuels abstraitement". C'est pour cela que je m'efforce tout de même de séparer des choses, et que je sais qu'il y a des aspects qui sont strictement psychologiques, névrotiques, et donc questionnables à travers une psychothérapie notamment cognitive, laquelle est entreprise. Effectivement il y a des questions auxquelles la psychothérapie dira "à cela on ne peut répondre avec nos outils, pose les dans la philosophie" et alors je ne m'adresse plus à mon psychiatre mais à mon professeur de philosophie générale. Parce qu'il y a bien des raisons pour que je vois, chaque semaine, un psychiatre. Ce n'est pas par simple convenance : une psychothérapie essaie de répondre à un type de souffrance. J'ai fait une dépression et j'ai voulu me suicider il y a six mois, d'octobre à mars, voilà la cruelle réalité, puisqu'on met carte sur table maintenant (enfin je ne me parle qu'à moi-même et certains font les voyeurs, etc). Alors au moins je vais essayer de ne pas me mentir à moi-même.
La seconde objection, c'est que l'on me dira "tu ne trouveras jamais la vérité de ton être, ni mêmes les causes qui t'ont amené à ce que tu es aujourd'hui" ; "arrête donc de te regarder le nombril, c'est comme cet homme égocentrique qui pense "il faut que j'arrête d'être egocentrique" et fait preuve performativement de son incapacité à ne pas l'être". Peut-être que si je suis tant egocentrée, c'est qu'il y a des raisons toutes bêtes, de la pure psy, banale, affligeante, que j'ai toujours écarté. Est-ce un mal d'être egocentré ? Le seul mal est d'en souffrir il me semble.
Si la vérité pour moi n'existe pas, si la recherche de la vérité ne se finit jamais, très bien, alors trouvons des vérités provisoires, pratiques, pour au moins se sentir bien et caresser un peu la grande vérité sans qu'elle ne nous brûle les ailes.
Et enfin, je crois qu'il faudra nécessairement parler de psychanalyse, que je conçois différement aujourd'hui (je la détestais, sans raison, pure ignorance). Je crois que la psychanalyse pourrait combler les apories de la philosophie et de la psychologie. Mais il faut bien penser ce qu'est la psychanalyse et ne pas se borner à l'analyse freudienne. Ce n'est pas tant le contenu de la psychanalyse qui m'intéresse (ses théories vaseuses..) que ce qu'elle dit, sa démarche, sa position. Il me semble que la psychanalyse est fondamentale pour comprendre ce qui se passe. Et ne me demandez pas si je veux faire une analyse : je n'en sais rien.
Quant à ce qui se dit et ne se dit pas sur un blog, et comment l'écrire, sans être chiant, sans être pompeux (j'ai l'impression de l'être en ce moment même et ça m'énerve, mais comme j'essaie d'être claire je me sens obligée d'écrire proprement) j'avoue trouver la frontière assez mince. Je ne crois pas que les trivialités de la psychothérapie soient les bienvenues. J'ai mes pudeurs quoi. Certains disent "raconter sa vie dans un blog : cliché". L'intérêt d'écrire dans un blog, c'est la clarté. Si je me contente d'écrire mes réflexions dans un carnet, alors je n'ai aucun effort à faire puisqu'aucun message à faire comprendre.
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Terrible ce sentiment à la fois de grande confiance et de bien-être, et ce manque d'assurance le plus total. La pire chose qu'on pourrait me dire si on me lisait c'est "Tu te prends la tête et tu joues les intellos, c'est débile ce que tu écris, ça ne sert à rien, tu te crées tes propres problèmes alors qu'il n'y en a pas". Tu crois que je n'y ai pas déjà pensé ?