«Est-ce que vous avez bien réfléchi à ce que c'est que la perte ? Ce n'est pas tout simplement la négation de cet instant généreux qui vint combler une attente que vous-même ne soupçonniez pas. Car entre cet instant et la perte il y a toujours ce qu'on appelle - assez maladroitement, j'en conviens - la possession.
Or, la perte, toute cruelle qu'elle soit, ne peut rien contre la possession, elle la termine, si vous voulez ; elle l'affirme ; au fond ce n'est qu'une seconde acquisition, toute intérieure cette fois et autrement intense.
Vous l'avez senti d'ailleurs, Baltusz ; ne voyant plus Mitsou, vous vous êtes mis à le voir davantage. Vit-il encore ? Il survit en nous, et sa gaieté de petit chat insouciant, après vous avoir amusé, vous oblige : vous avez dû l'exprimer par les moyens de votre tristesse laborieuse.»
Rilke
Je suis tombée aujourd'hui sur ce texte par hasard, alors que j'écrivai il y a quelques jours cela même :
Quand on perd quelque chose, c'est une petite partie de soi qui part. Bergson est mort avant-hier, je comprends maintenant pourquoi on fait des jeux de mots avec la chair et ce qui est cher. J'imagine que le lien entre les choses et la chair est proportionnel.